Le Musée royal de l’Armée et d’Histoire militaire rouvre les portes de la salle Armes et Armures magnifiquement rénovée
Qui se souvient du Musée de la Porte de Hal avant sa fermeture en 1976 ?
Les importantes collections d’armes et armures qu’il renfermait avaient alors été transférées au Musée de l’Armée, installé à quelques stations de métro du centre-ville, dans le Parc du Cinquantenaire. Une première présentation enthousiasmante (1987-2006) ne suscitait néanmoins plus l’engouement initial du public et nécessitait un renouvellement en meilleure adéquation avec les concepts muséographiques contemporains.
Douze années ont été nécessaires à la rénovation de la salle Armes et Armures qui vient de rouvrir ses portes au sein du Musée royal de l’Armée et d’Histoire militaire (rebaptisé récemment War Heritage Institute – whi). L’origine la plus lointaine de cette collection n’est autre que l’arsenal que les ducs de Bourgogne avaient installé au Coudenberg au xve siècle et qui avait connu divers accroissements et aléas jusqu’à l’incendie du palais au xviiie siècle. Avec celles de Madrid (Real Armería) et de Vienne (Hofjagd- und Rüstkammer), la collection du musée de Bruxelles constitue l’un des plus prestigieux ensembles européens d’armes et d’armures du Moyen Âge.
La nouvelle présentation, claire et esthétique, évite l’écueil trop fréquent du « tout au numérique ». Les écrans didactiques, peu nombreux, sont efficaces et non interactifs. L’accent est maintenu sur l’objet qui est quelquefois mis en exergue, sans pour autant rompre le principe général de l’accumulation. Ceci s’inscrit dans la continuité de la présentation des autres salles du musée ; pour le plus grand bonheur de l’amateur (fig. 1).
Chef du service Muséologie-expositions du whi, le docteur en histoire Pierre Lierneux projetait, dès avant la crise du Covid 19, de consacrer une vitrine aux guerres de religions dans une exposition temporaire qui n’a pas vu le jour et qui aurait dû s’intituler « Yo El Rey, le règne de Philippe ii ».
Dans le but d’illustrer les dégâts occasionnés par les iconoclastes aux œuvres d’art dans les églises, Pierre Lierneux avait jeté son dévolu sur des fragments de statuettes qu’il avait pu admirer dans le Trésor de la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule, installé à l’intérieur de la chapelle du Saint-Sacrement du Miracle. Il s’agit d’objets que la srab avait récoltés lors des fouilles sous le chœur de l’église, au début des années 1990, juste au-dessus de la crypte romane. Un concassé de sculptures en pierre formait une couche de rehaussement du sol, réalisé vers 1600 à la faveur des restaurations de l’église qui avait subi les affres des destructions dues aux Protestants durant la dernière guerre civile des années 1580-1590. Des monuments religieux (jubé, autels, retables, tourelle eucharistique, gisants,…), composés principalement de la fragile pierre d’Avesnes, étaient sans doute trop endommagés pour envisager leur réparation ; place fut faite à de nouveaux ouvrages d’art de style baroque, dans l’air du temps. Propriété de la Fabrique d’Église de Saints-Michel-et-Gudule, les statuettes suscitent l’émerveillement des touristes parmi les autres chefs-d’œuvres d’art religieux exposés dans le Trésor de la cathédrale. Il n’était pas question de dégarnir la vitrine, spécifiquement conditionnée par des présentoirs adaptés à chaque objet. Au sein de la Fabrique d’Église, Frank De Rijck se souvenait toutefois que la srab conserve en ses réserves plus de 10.000 autres fragments sculptés, qui nous ont été confiés pour étude. Cinq objets de qualité exceptionnelle ont été sélectionnés pour être exposés dans la salle Armes et Armures (fig. 2). Il s’agit de fragments de statuettes, d’une main de statue polychrome et d’un élément d’arcature à crochets issu d’une micro-architecture gothique.

Fig. 1 – Coup d’œil sur la nouvelle muséographie de la salle Armes et Armures du whi.
© whi.

Fig. 2 – Salle Armes et Armures du whi. Détail de la vitrine consacrée aux « Guerres et
religions ».
On distingue les cinq fragments sculptés issus des fouilles de la srab sous le chœur de la
cathédrale Saints-Michel-et-Gudule © srab.
La contribution de la srab à cette nouvelle réalisation muséographique est certes modeste mais elle est néanmoins remarquable, en l’absence de lieu pérenne ou d’une exposition temporaire qui présenterait l’ensemble de nos recherches archéologiques. Après la fermeture provisoire, pour cause de travaux, du musée Bruxella 1238 et de la galerie d’exposition du Coudenberg, le fruit des fouilles récentes de la srab a perdu en visibilité.
L’ouverture à Bruxelles, en septembre 2020, d’un musée consacré au livre ancien et à la bibliothèque des ducs de Bourgogne (kbr museum) nous a déjà donné l’occasion de présenter quelques objets issus de nos fouilles au palais du Coudenberg (lampe à huile, fermoir et garnitures de livres) et rue Notre-Seigneur (moules de fondeur pour la fabrication de stylets en cuivre étamé). Les fines sculptures de la cathédrale bénéficient
désormais d’une excellente visibilité en deux lieux distincts de la ville. La réserve des 10.000 fragments nous ouvre assurément de belles perspectives vers d’autres lieux d’exposition…
Sandrine Smets, la commissaire générale de la rénovation de la salle Armes et Armures, proposera prochainement une visite guidée de
spécialiste aux membres de la srab.
Michel Fourny
Société royale d’Archéologie de Bruxelles




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